
La question est lancée innocemment, dans la tiédeur paresseuse d’un samedi matin ensoleillé, alors que les oiseaux chantent et que le bambin dodu s’applique à renverser consciencieusement tout objet placé à sa portée. Elle est lancée, pas si innocemment au fond, par la femme épuisée de son marathon hebdomadaire (le classique enfants – boulot – intendance – lessives – ménage – paperasse, au choix et en pagaille, même si bien sûr Chéri Chéri est un modèèèle de modernité, partage des tâches, implication etc etc).
Alors je m’adresse à toi, l’Homme. Toi qui, les pieds sur le canapé, savoures paresseusement ta BD et le confort du foyer (car après tout, c’est le weekend) avec un détachement enviable. Toi qui t’apprêtes à faire cette réponse pleine de bonhommie et de bonne volonté masculine : « mais ce que tu veux, ma chérie ».
Malheureux ! N’as-tu pas prononcé ces mots qu’un vent de révolte souffle dans la pièce. Pauvre de toi, qui n’as pas su deviner l’attente immense cachée derrière cette question en apparence ordinaire. Pauvre de toi, qui n’a pas su saisir l’opportunité qui t’était donnée de faire montre de ta force et de ta bravoure.
Car laisse-moi t’expliquer : en t’interrogeant de la sorte, ta dulcinée ne tentait rien de moins que de s’extraire de la pesanteur du quotidien.
En te questionnant ainsi, elle espérait en secret une réponse décidément virile et farouchement romantique du style : « viens je t’emmène sur mon gros poney blanc cueillir des fleurs de safran pour le dîner gastronomique que je te prépare ce soir », ou encore paternellement impliquée et logistiquement schiadée du genre : « j’ai justement appelé l’accrobranche des Ecureuils volants et j’y ai donné rendez-vous aux Trucmuches pour 15h00 », ou même simplement maîtrisée et infiniment reposante : « ne t’occupe de rien mon amour, j’ai prévu un pique-nique sain et végétal à grignoter sur ce superbe GR que nous avions repéré ».
Alors, si je peux me permettre de te donner un conseil et si tu veux vraiment passer un bon weekend, la prochaine fois que tu entendras cette question suis les instructions suivantes :
1/ Pose la BD (promis tu la reprendras après).
2/ Tourne-toi, l’air aimable et impliqué, vers le doux visage d’où provient ladite question.
3/ Propose quelque chose. N’importe quoi. Enfin, sauf une solution impliquant ta disparition (même temporaire) de la cellule familiale (type le match de tennis avec copain Greg, oublie : fallait anticiper).
4/ Si ta proposition est rejetée par la toute aussi douce personne, ne panique pas. Ne grogne pas et ne reprends SURTOUT pas la BD. Prends juste un air encore plus aimable et impliqué et prononce une phrase de ce genre : « et si tu venais t’assoir pour me dire ce qui te ferait du bien aujourd’hui ? ».
Alors, promis…la journée sera belle !
Merci pour cet article si drôle et si vrai !