Il y a celles qui attendent, celles qui enchaînent, celles qui choisissent et celles qui ne choisiront jamais. Celles qui regrettent, celles qui se loupent, celles qui accueillent et celles qui refusent. Celles qui s’excusent, qui ont honte, qui ne comprennent pas, celles qui ne rentrent plus dans le moule ou celles qui sont prêtes à tout pour y rentrer. Celles qui te vendent leur maternité débordée, trépidante, parfois mêmes un peu accidentée et celles qui sont heureuses de te parler du temps qu’elles prennent avec chacun. Il y a celles qui aimeraient tant mais qui ne peuvent pas ou plus pour l’instant, celles à qui la nature rappelle que ce n’est pas nous qui décidons, en fait. Il y a celles qui diffèrent, celles qui accueillent. Celles qui voulaient différer mais qui accueillent quand même.
Et au milieu, il y a moi. Avec tout autant d’hypothèses et de « il y a ». Il y a les jours où je pense à l’avenir et à la formidable fratrie toute rapprochée que je vais leur offrir. Il y a d’autres jours où la fatigue me dépasse, m’harasse, me désespère et où je me réjouis de pouvoir pour l’instant, prendre du temps. Il y a des « allez viens, ça donne envie ! », aux allures de s’il te plaît. Il y a mes désirs de don, de sacrifice. Il y a aussi ma carrière, ma vie sociale, mon inspiration, ma créativité, mes projets. Ralentis ou accélérés. Il y a les autres, leur regard, le désir d’appartenir à une tribu de famille presque toutes pareilles. Et il y a les confidences, les difficultés de chacune et les doutes quotidiens. Les petits désespoirs puis la lumière de la confiance, l’espoir du temps qui va vite passer.
Et puis il y a les siens. Quels sont ses « il y a » ? Quels sont ses bons, ses meilleurs et ses mauvais moments pour ? Quelles sont ses attentes, ses modèles ? Qu’est-ce qu’il en pense, en fait, d’avoir encore un enfant ?
Le risque c’est que chacun se débrouille avec ses « il y a », que dans son petit théâtre interne chacun pense à ses hypothèses, ses projets et que jamais le couple ne se rencontre pour de vrai. Combien de couple ne semblent pas tout à fait au clair sur ce projet-là. La vie, qui souvent rattrape et réconcilie d’abord, ne permet pas les retrouvailles profondes et pérennes.
Dans le couple, décider d’accueillir une nouvelle petite vie, faire grandir un enfant, ne se décide jamais autant à deux que lorsqu’un des deux semble douter. Emmener l’autre, le rassurer, l’enthousiasmer, le raisonner, ou lui demander, c’est créer un endroit tout nouveau dans le couple, celui du choix quotidien, ensemble et celui de l’unité, plus chère que tout.
Lénaïg Steffens