
On a l’habitude de raconter l’amitié chez les enfants comme une rencontre de bac à sable, des tout-petits qui ne se connaissent pas et se mettent à jouer ensemble le plus naturellement du monde.
Sans se poser de questions.
Mais très vite, les questions arrivent, en réalité. Maintenant que je suis mère, je le réalise.
Pourquoi s’entend-t-elle mieux avec la fille des voisins, si différents de nous, qu’avec celle de mon amie, à l’éducation si proche ?
Pourquoi choisit-il toujours ses amis parmi les plus turbulents de la classe ?
Pourquoi est-elle toujours seule dans la cour quand je viens la chercher ?
Dois-je l’encourager à être lui-même ou insister sur les règles de sociabilité ?
Faut-il embarquer leurs copains en vacances ou privilégier le temps familial ?
L’empêcher de voir tel ami à l’influence douteuse ou le laisser expérimenter ?
Est-il plus important d’accepter son besoin d’imitation et de reconnaissance des pairs ou de souligner notre particularité éducative ?
La place de l’amitié, mais aussi ses codes, ses limites, sa force. C’est une danse incessante autour du cercle de famille et à l’intérieur de lui-même.
C’est aussi une nouvelle confrontation des parents, de leur histoire et de la façon dont chacun a vécu ces relations enfantines et adolescentes. Ce qu’il garde de joies précieuses ou de regrets.
L’amitié n’est qu’un maillon de notre éducation, de leur enfance. Mais l’on sait bien que ce maillon est fondamental. Mur porteur qui ouvre à une autre façon de vivre et de penser. Univers protégé qui permet l’intimité, les découvertes et aussi les erreurs.
Au fond, il est toujours question d’apprendre à aimer et à être aimé.
Et l’on n’a pas assez de toute une vie pour ça !