« Il finira par ressembler à son père. »
Cette phrase, on me l’avait déjà dite. Je la trouvais amusante et un peu surannée. « Oui, bon, d’accord… peut-être que physiquement il y aura une ressemblance. Mais comment cet homme que je connais aujourd’hui pourrait, un jour, se rapprocher de ce qu’est son père ?»
Parmi toutes les mixités qui peuvent exister dans un couple, il y en a une, à mon avis, qu’on oublie souvent : nous ne sommes pas nés des mêmes parents.
Et, aussi banale que cette affirmation puisse être, je comprends aujourd’hui toute son importance. La place que prend la famille de l’autre dans la construction de sa propre famille est énorme. Et ça n’a rien à voir avec le fait d’être proches d’eux ou non, de les voir souvent ou pas. La construction mentale et émotionnelle du couple et de la famille est forcément née de ce que nous avons connu enfant.
Je ne pensais pas que toutes ces « micro » différences me pèseraient autant. Pourtant, parfois, elles prennent toute la place.
Par exemple, le fait que sa mère soit toujours autant encensée et mise sur un piédestal, au point où ça n’a plus de sens et où toute remise en question est fortuite. Ce besoin de dire que c’est une « mère parfaite » et que j’en suis une aussi, du coup. Cette mystification de la perfection maternelle est lourde à porter.
Un autre exemple tout bête me vient en tête. Nous emménageons dans une nouvelle maison qui ressemble étrangement à celle de mes beaux parents. Mon mari déballe les cartons, dispose les meubles et la déco et, petit à petit, inconsciemment, reproduit l’agencement de ses parents. Silencieusement, je me suis alors mise à « déconstruire » cet intérieur en changeant tel ou tel objet de place. Ce moment était comme une représentation physique et visuelle de ce qui se joue dans notre vie de famille.
Des tas et des tas d’autres détails existent : l’interdiction pour les enfants de jouer dans le salon, cette façon de couper la parole à table, la valorisation du sport plus que la lecture, les drôles de traditions à Noël, les goûts pour la déco, les habitudes alimentaires ou le type de vacances.
Alors, oui, la plupart du temps, je ne fais pas attention à ces différences. Elles nous enrichissent et font notre couple. Et peut-être que celles qui me sautent aux yeux n’ont pas spécialement d’importance puisque l’essentiel est là. Mais, je crois qu’il ne faut pas oublier qu’un couple c’est avant tout une vie quotidienne et de nombreux jours passés côte à côte. Donc ce qui semble être minuscule au début peut devenir insurmontable au fil des années.
Si je pouvais parler au « moi » d’il y a quelques années, je me dirais de faire attention à tous ces détails, de ne pas les laisser passer en croyant qu’ils sont insignifiants et de tout de suite en parler pour trouver une nouvelle culture familiale à deux. C’est, à mon sens, le secret du bonheur à deux !
Sophie