« Comment cela peut-il encore arriver, en 2022 ? »
La guerre est une chose monstrueuse, tout être sain d’esprit la rejette. La souffrance d’autres êtres humains est difficilement supportable – en particulier il faut l’avouer quand ils nous sont proches, géographiquement, culturellement, par leur statut de mères et d’enfants…
Mais une fois cela posé, cette réaction d’indignation (sincère) questionne profondément notre rapport à la violence. Membres à part entière de la « génération nunuche » (CF article de Maroussia Dubreuil dans le Monde, août 2021), aurions-nous découvert jeudi matin en nous levant l’existence d’un rapport d’affrontement entre les hommes et les peuples ?
Nous réagissons avec toute la puissance (?) de notre émotion, « escortée par son armée d’émojis » comme le décrivait si justement la journaliste. Pourtant, des conflits armés ravagent le monde partout ailleurs et sans interruption depuis la nuit des temps.
Si nous étions tout à fait honnêtes, nous admettrions que c’est sa proximité et ses impacts potentiels sur notre vie, sur notre confort qui rendent cette guerre profondément choquante. Que nous avions jusqu’alors pu considérer, avec un fond de colonialisme rassis peut-être, que la guerre était le vestige d’un monde barbare, persistant tout juste dans des régions sous-développées.
Et cette certitude éclate. Cette guerre nous inquiète, car ceux qui la subissent nous ressemblent. Nous avons, en fait, peur. Et au-delà de l’émotion, au-delà de l’indignation, je me demande ce que nous serions capables de FAIRE.
« Où est passée la violence ? », nous demandions-nous en début de mois.
Juste là, sous le tapis. Humiliation refoulée d’une personne ou d’un peuple, elle explose au mieux par les cris ou le vote, au pire par l’agression et les armes. Mon papa m’a toujours dit et répété (cf le dernier post d’@unechambreamoi) que la paix était un phénomène anti-naturel, fruit de la construction patiente d’une civilisation entière. Il suffit de regarder un reportage animalier pour le comprendre.
Comment expliquer la guerre en Ukraine à nos enfants ?
En leur expliquant peut-être que c’est le même mécanisme qui les pousse à 2 ans à chiper le râteau des mains de leur copain, qui pousse plus tard un chef à s’emparer d’une bande de terre. Que la gravité de la baffe donnée évolue malheureusement avec l’âge et la puissance, mais que la racine est la même, immuable, animale. Que c’est la raison pour laquelle notre dignité d’homme est de nous battre, violemment, tout au long de notre vie, pour choisir le bien. Qu’éduquer un petit humain n’est pas étouffer cette violence, la cacher, tenter de la faire disparaître de nos vies, de la glisser sous le tapis de l’enfance enchantée et des douces journées. Mais bien de l’orienter, de toutes nos forces, vers ce qui est bon.